Les liaisons dangereuses

Attention, point sensible. Les déterminants numéraux représentent environ 60% des fautes de liaison à l’oral (chiffre officiellement pas prouvé), sans parler des nombreuses erreurs à l’écrit bien sûr. Il n’y a qu’à zapper sur BFM quelques secondes pour en relever une belle (dernièrement, un superbe « quatre zenfants »), et encore, ce n’est que le sommet de l’iceberg, même s’il suffit à faire chavirer nos cœurs d’esthètes de la langue française. Pourtant la règle n’est pas si compliquée quand on se penche dessus, en tout cas bien moins compliquée que comprendre la trajectoire artistique d’Elie Semoun.

Alors déjà, il faut retenir que tous les déterminants numéraux sont invariables sauf vingt et cent (pensez à votre pote Vincent pour vous en souvenir, on a tous un pote qui s’appelle Vincent). Les quatre, huit, douze, trente, quarante et leurs amis ne prennent donc jamais de « s », à l’écrit et donc à l’oral non plus cela va de soi.

  • « Ces huit entreprises milliardaires du CAC 40 ont déclaré avoir besoin d’un prêt pour survivre. »
  • « Trente personnes par jour déclarent jeter leur masque sur la voie publique parce que, je cite, la poubelle elle est beaucoup trop loin wesh. »
  • « Plus de cent étudiants ont participé à la marche pour le climat en venant en scooter. »

Mais alors, me direz-vous, puisque cent n’est pas invariable, pourquoi n’ai-je pas mis de « s » ? Et pourquoi ne peut-on pas dire « cent zétudiants » ? Eh bien la réponse est simple, cher amateur de cyborg autrichien. Quand les déterminants numéraux vingt et cent sont employés seuls, ils ne prennent jamais de « s ». En revanche, ils s’accordent quand ils sont multipliés et non suivis d’un autre numéral. Ça peut paraître un peu décousu mais c’est plus clair qu’une chanson d’Aya Nakamura donc pas d’excuses merci. En l’occurrence :

  • « Cinq cents animaux interviewés trouvent que se lécher le cul soi-même c’est toujours plus propre qu’un être humain lambda. » ==> ici, cent est multiplié (par cinq) et non suivi d’un autre numéral donc on peut accorder et on peut se faire plaisir sur le « zanimaux », je sais que vous aimez ça.
  • « Quatre-vingt-trois personnes sur cent pensent que porter un masque quelques minutes dans un commerce est au moins aussi insupportable que six années de guerre contre les nazis. » ==> dans ce cas particulier, vingt est multiplié mais il est suivi d’un autre déterminant numéral et donc le « s » disparaît.

Les plus filous diront que le plus simple est encore d’écrire tous ces déterminants en chiffres, et hop on n’en parle plus on peut retourner devant « Les Anges de la télé-réalité à Cancun », mais l’erreur restera à l’oral, et le jour où ces mêmes personnes feront une liaison bien sale du type « j’ai mangé huit zœufs à midi », rien, pas même une intervention de Bernard-Henri Levy, ne pourra les sauver de la honte et du ridicule. C’est dire.

Il est à noter que les mots millier, million et milliard sont des noms, et pas des déterminants numéraux, il faut de ce fait les accorder normalement. On écrira donc deux millions, cinq milliards, etc.

  • « Quatre-vingts millions d’Américains ont voté Trump parce que quitte à se taper un nouveau Hitler autant ne pas avoir à traverser la Normandie cette fois. » ==> vingt est multiplié mais pas suivi d’un numéral car million est un nom, donc on peut l’accorder.

Le meilleur pour la fin (vivement la fin de carrière d’Hanouna) : mille. Alors là, c’est à la fois vicieux et très simplet, comme Hanouna, puisque mille peut être soit un déterminant numéral, soit un nom, et du coup on se dit ohlala c’est trop chiant, mais il reste toujours invariable quel que soit le cas de figure, et du coup on se dit ah tant mieux c’est cool. Donc on peut écrire trois mille, quatre-vingts mille, ou encore « j’ai gagné des cents et des mille », il n’y aura jamais de « s ». C’est super simple.

  • « Hanouna gagnerait quarante-mille euros par mois sans compter les dividendes. » ==> on dit bien quarante-mille euros, et pas « zeuros ». Remarquez, avec ou sans liaison, cette info est moche quand même.

Bref, tout ça pour dire que ces problèmes de déterminants numéraux, ça sonne faux à l’écrit, et ça sonne moche à l’oral. Aya, Jul, gros bisous.

N.B. : Les propos tenus envers MM. Hanouna et Levy sont à prendre au second degré, ce sont des personnes que j’aime d’amour et de licornes, et pas seulement parce qu’elles pourraient faire fermer mon blog d’un simple coup de téléphone. Vive eux et ce qu’ils apportent à la culture.

Les pléonasmes (partie 1)

Monter en haut, sortir dehors, collaborer ensemble. Le genre d’expressions aussi courantes que dégueulasses, vous en conviendrez. C’est ce que l’on appelle communément un pléonasme. À l’origine, le but d’un pléonasme était pour l’auteur d’appuyer sa pensée, d’insister sur quelque chose pour lui donner plus de force, comme lorsque Racine disait « je l’ai entendu de mes oreilles » (sic). Techniquement on se doute bien qu’il ne l’avait pas entendu avec ses prémolaires mais ce pléonasme était souhaité par l’auteur, en son temps, et serait considéré aujourd’hui comme fâcheux. D’où l’importance quasi vitale de les repérer et de les cerner pour mieux les bannir de votre quotidien (oui on dirait un tract du Front National mais restez concentrés). Voici donc une petite liste de quelques pléonasmes récurrents et laids comme tout :

  • « Au jour d’aujourd’hui, on recense plus de gens en train de faire la queue devant Zara que de gens lettrés. »
    • L’expression « au jour d’aujourd’hui » ne sert pas à grand-chose, un simple « aujourd’hui » suffirait pour exprimer cette terrible vérité.
  • « Après vérification, l’information précédente s’est avérée vraie. »
    • Si une information est avérée, elle est donc vraie, pas besoin de faire cette répétition. Même si ça me bouche une artère de l’admettre.
  • « Suite au déconfinement les gens réadoptent un comportement plutôt con, voire même plutôt très con. »
    • Voire et même forment une répétition, l’un ou l’autre suffisait amplement, surtout pour énoncer une banalité pareille.
  • « Trump et Bolsonaro rêvent de collaborer ensemble pour un monde meilleur. »
    • On ne collabore jamais tout seul normalement, même si on n’est jamais mieux servi que par soi-même, genre Gollum un peu.
  • « Le krach boursier qui nous attend va détruire toute vie humaine sur Terre et rendre le pouvoir aux hommes-crabes. »
    • Un krach est forcément boursier, c’est un mot emprunté à l’allemand (donc à l’autrichien, clin d’œil clin d’œil) qui indique un effondrement des cours de la bourse. Il te troue le cul celui-là hein ? Tu te dis « hé mais à BFM ils l’emploient très souvent pourtant ! ». Ehhhhhhhhhhhh ouais…
  • Fast & Furious 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, …

Il en existe bien sûr beaucoup d’autres que nous verrons en temps voulu, il faut que les gens fassent leur deuil de tout ça d’abord, mais il en est un qui me tient particulièrement à cœur. Le vil, le malodorant, l’incestueux « etc… » (même mon clavier vient de vomir). Donc pour rappel, l’abréviation « etc. » se termine toujours par un seul point, et non par les fameux trois petits points, autrement il se forme une répétition bien lourde digne des meilleures séries TF1. En résumé, soit on met les trois petits points, soit on met « etc. » mais pas les deux. Se répéter, c’est radoter. C’est bégayer. C’est balbutier. C’est naze. Regardez Schwarzy par exemple. Il a fait un film Terminator, et puis un autre sept ans plus tard, et puis c’est tout. Pas d’autres. Sinon on aurait trouvé ça répétitif. Il n’y a donc que deux Terminator. C’est tout. CQFD. Ouais.

« Soi-disant », cette médisance

Parmi les nombreux adjectifs ayant une orthographe d’enc*** de sa race, « soi-disant » surnage totalement. D’abord, il faut se rappeler d’où vient ce mot, ce qu’il signifie réellement. À l’origine, cette forme un peu vétuste du participe présent du verbe « se dire » se définit comme « qui se prétend, qui se dit tel ». Elle ne peut donc techniquement se rapporter qu’à des personnes, et non à des objets.

  • « Cette soi-disant panoplie de casseroles en cuivre étamé de la Régence » ==> normalement une panoplie de casseroles ne peut pas se définir comme telle, sauf si votre panoplie de casseroles sait parler. Là ça passe.

De plus, comme tout participe présent qui se respecte, il est invariable. Il ne doit donc jamais être accordé, comme la guitare de Calogero apparemment. Évitons donc les « soi-disants » ou encore les « soi-disante ». Beurk.

  • « Ces soi-disant smicards viennent de claquer 400 balles chacun pour un tatouage » ==> invariable, on n’accorde pas l’adjectif. Et puis chacun fait ce qu’il veut de sa thune, même quand il est censé ne pas en avoir pour bouffer. C’est vrai quoi…

Etant donné que l’adjectif « soi-disant » veut dire « qui se dit soi-même », attention aussi à ne pas l’écrire « soit-disant ». C’est faux et dégueulasse à la fois, comme les textes de Caloge.. non je plaisante chacun ses goûts, merde, il faut que je lui foute la paix.

Une fois que l’on a fait fi de ces erreurs communes, tutoyons de plus près cette subtilité propre à notre blog. En effet, le véritable problème de cet adjectif est qu’il est souvent employé à tort ! Je m’explique :

  • « Ce soi-disant pervers sexuel récidiviste est en train de se laver les mains »

A priori, pas de problème ici, l’adjectif est écrit correctement MAIS comme on l’a dit plus haut, « soi-disant » signifie « qui se dit soi-même », « qui se définit comme ». Normalement, on ne se dit pas pervers sexuel récidiviste, sauf si on en est particulièrement fier, ou bien scientologue, ou bien les deux. À la place, on préférera utiliser la forme « ce prétendu pervers sexuel récidiviste ». De même, on ne dira pas « ce soi-disant meurtrier », sauf encore une fois si cette personne s’accuse elle-même du crime. Une conception de l’honnêteté peu courante de nos jours.

Cette utilisation abusive de « soi-disant » peut donner lieu à des situations cocasses. Regardez Pluto :

C’était une blague (voyez comme l’orthographe des mots est importante). Regardez plutôt :

  • « Ce supporter du Paris Saint-Germain s’est soi-disant suicidé après la remontada de mars 2017 »

Au-delà de la raison de ce suicide (j’en ris encore, c’était si bon), on part donc du principe que ce supporter s’est suicidé et qu’ensuite il a pris la parole pour dire à tout le monde qu’il est un suicidé. Cocasse non ? Saugrenu. Aberrant même. Comme le succès de Calog…

N.B. : Les goûts musicaux exprimés ici sont d’une subjectivité propre à l’auteur de cet article, ils ne doivent pas être pris au sérieux. Second degré et irrévérence peut-être, mais humanité avant tout. Cet article n’aurait jamais pu voir le jour sans Les Nuls et Les Inconnus. Hommage à eux.

La condition du futur

S’il est bien une faute grammaticale que l’on retrouve absolument partout, de la une d’un journal hebdomadaire jusque dans les tréfonds d’une discussion Messenger, c’est celle-ci : confondre le futur simple et le conditionnel présent. Pourtant leurs terminaisons sont assez différentes, mais il en est une qui peut poser souci, à savoir la première personne du singulier.

  • « Je postillonnerai sur ce pauvre vendeur » (futur simple)
  • « Je postillonnerais sur ce pauvre vendeur » (conditionnel présent)

Effectivement, à l’oreille, cela sonne pareil, un peu comme les trois derniers albums de U2. En revanche, lorsque l’on fait fonctionner sa verve scripturale, on remarque une différence dans les deux terminaisons : « ai » au futur, et « ais » au conditionnel. Cette subtilité orthographique permet de les différencier, certes, mais aussi, comme souvent dans notre belle langue, de savoir de quoi on parle, ou ici en l’occurrence, à quel temps. Par exemple :

  • « J’envahirais bien l’Autriche-Hongrie cet été moi. » ==> conditionnel, peut-être que ce sera fait, peut-être pas, peut-être aussi que ce serait mal vu.
  • « J’envahirai l’Autriche-Hongrie dès la fin du confinement. » ==> futur, ce sera fait avec la certitude et l’ambition inhérentes à un tel projet.

Techniquement, la différence entre ces deux temps doit se « sentir », il faut apprécier le caractère hypothétique de l’un par rapport à la réalité de l’autre, savourer l’effluve diffusé par la plume de l’auteur, s’imprégner corps et âme du sujet afin que chaque particule de notre système puisse témoigner de cette temporalité sous-jacente, s’inscrire dans une mythologie littéraire où le temps et l’espace ne sont soumis qu’à un simple appareil linguistique, un apostolat sensoriel prégnant JE DÉCONNE le plus simple c’est de tout foutre au pluriel. Du coup :

  • « Je vivrai suffisamment longtemps pour voir les machines prendre le pouvoir. » ==> futur ? conditionnel ? Si on met au pluriel ça donne :
    • « Nous vivrons suffisamment longtemps pour voir les machines prendre le pouvoir. » ==> pas d’hésitation au pluriel, la terminaison est propre au futur uniquement.
  • « Je devrais envoyer une machine moitié autrichienne moitié tronc d’arbre leur filer un coup de main. »
    • « Nous devrions envoyer une machine moitié autrichienne moitié tronc d’arbre leur filer un coup de main. » ==> mettre la phrase au pluriel nous aiguille vers le conditionnel, d’où cette terminaison.
  • « Moi, j’aurais envie de bluffer ?! Vous plaisantez Martoni ! »
    • « Nous, nous aurions envie de bluffer ?!… » ==> conditionnel encore une fois. Et puis de toute façon il n’y a que Martoni qui sait vraiment bluffer.

Comme on le voit, la différence est ténue. Il faut être capable de sentir la chose, comme un chien d’aveugle près du périph, et de faire confiance à son instinct de grammar predator (on ne va pas traiter un Autrichien de grammar nazi, ça n’a pas de sens). Mais au moins, cette faute « n’existe » qu’à l’écrit, elle fait donc plus mal aux yeux qu’aux oreilles, le contraire de Marion Maréchal. Cela n’excuse évidemment pas l’erreur, mais ça rassurera les journalistes de BFM. Il faut vivre avec son temps, voila tout…

Les barbarismes (partie 1)

Le barbarisme, contrairement à la barbarie, ce n’est pas manger du pain de mie sans croûte ou faire tourner son lave-linge à minuit dix. Dans le cadre complètement sérieux de ce blog complètement second degré, on fera plutôt référence à ces fameuses erreurs de langage qui consistent à se servir de mots altérés pour, par extension, les employer dans un sens contraire au bon usage. En français, les barbarismes sont au moins aussi nombreux que les chemises à carreaux dans une penderie texane, et la plupart sont suffisamment ancrés dans nos propres usages pour que l’on ait du mal à séparer le bon grain de l’ivraie. En voici quelques-uns qui, comme ce bon vieux « malgré que » (brrrr), méritent une attention particulière, avec ou sans masque :

  • Rémunérer vs Rénumérer : la confusion est fréquente, probablement à cause de « énumérer », mais il faut évidemment dire rémunérer. Le M vient avant le N, l’amour vient avant la haine. Jean Jaurès. Ou Booba, je sais plus.
    • « La rémunération de cet actionnaire dépasse le PIB du Gabon »
  • Pécuniaire vs Pécunier : on entend souvent le mot pécunier (des besoins pécuniers…) mais c’est une invention pure et simple. Au féminin comme au masculin, le mot juste est pécuniaire. Il vient du latin pecus, qui veut dire troupeau, symbole de richesse dans la Rome antique. L’étymologie a été conservée au fil du temps puisque, aujourd’hui plus que jamais, le PQ reste un symbole de richesse et d’abondance.
    • « Les ennuis pécuniaires des Balkany me fendent le cœur, Marius »
  • Résoudre vs Solutionner : exemple typique du mot inventé par facilité d’usage. « Solutionner » est un barbarisme, une tentative paresseuse pour éviter d’employer le mot « résoudre », dont l’accord n’est pas des plus simples il est vrai. Le mieux est donc de l’utiliser plus régulièrement, en guise d’entrainement. Résolvons-nous à résoudre ce problème, crénom !
    • « Résoudre mon problème d’alcool m’a permis d’obtenir mon brevet des collèges »
  • Indiana Jones et le Royaume du Crâne de Cristal : un barbarisme de 2008. Quitte à se marrer avec exotisme, préférez-lui « Tonnerre Sous les Tropiques ».

Les exemples sont encore très nombreux, en faire une liste exhaustive demanderait du temps, des efforts et un whisky, on va donc s’arrêter là pour l’instant. Gardons en tête que certains de ces barbarismes sont tolérés dans le langage courant, et sont considérés comme critiquables plus que fautifs, mais le mieux, dans notre recherche de l’absolue perfection, est de les éviter autant que possible. Évitons de dire « solutionner », bannissons « pécunier », et clamons haut et fort que Indiana Jones est et restera une trilogie.

« Les plus » de la langue française

Il est des erreurs qui sont tellement ancrées dans notre subconscient que l’on est persuadé de ne pas se tromper. Et ces mêmes erreurs, que l’on fait généralement à l’oral, se retrouvent dans nos écrits, à l’encre indélébile, jusqu’à la fin des temps (référence, wesh). Par exemple, le type qui, bafouillant trois phrases en mangeant son jambon-beurre, tente un improbable « les gens croivent », sait qu’il est en tort, il sait qu’il vient de griller le feu rouge du bon sens, et qu’il devra faire l’effort de concentration nécessaire à l’écrit pour NE PLUS JAMAIS oser l’invraisemblable. Les paroles s’envolent, mais les écrits restent. On prie d’ailleurs pour que Christophe Maé ne sache pas écrire.

L’une de ces erreurs communes concerne « le plus ». Aussi curieux que cela puisse paraître pour les gens normaux, donc ni Autrichiens, ni cinq fois Mister Univers, ni à moitié cyborg, l’article « le » doit ici s’accorder ou non selon l’idée exprimée. Explication :

  1. « C’est quand elle philosophe connement que Lara Fabian est le plus chiante. »
  2. « C’est quand elle philosophe connement que Lara Fabian est la plus chiante. »

Dans le premier cas, on souhaite exprimer l’idée que lorsque Lara Fabian laisse parler son cœur, comme sur le plateau de The Voice, elle atteint le plus haut degré de « chiantise » jamais aperçu à l’œil nu par ses fans. Plus chiante donc que quand elle rit, chante, pleure, ou bat trois œufs. Il n’y a pas de comparaison possible avec autrui, mais seulement avec elle-même. C’est pourquoi « le plus » est ici invariable. En revanche, dans le deuxième cas, on préfère appuyer sur le fait que lorsque Lara Fabian se laisse aller façon Aristote de TF1, elle arrive à être la plus chiante aux alentours, donc plus chiante que Pascal Obispo ou Amel Bent (oui oui) par exemple. La comparaison avec autrui est possible, elle est exprimée (ou supposée), et donc l’accord de « le plus » se fait normalement, au féminin ici.

Autre exemple, au pluriel cette fois :

  1. « C’est quand ils mangent des animaux bizarres que les Chinois sont le plus cons » ==> les Chinois n’ont jamais été aussi cons qu’en se tapant du pangolin à l’apéro. Donc invariable.
  2. « C’est quand ils mangent des animaux bizarres que les Chinois sont les plus cons » ==> quand ils font ça, les Chinois arrivent à être encore plus cons que d’autres populations. Donc on accorde.

Comme souvent en français, cette petite subtilité a un réel intérêt : celui de savoir de quoi on parle. Ce n’est pas simplement là pour nous ennuyer, mais pour être précis quand on veut s’exprimer dans une langue soignée, douce et chatoyante comme ce plaid en acrylique qui nous borde en novembre. Mais il faut reconnaître que la tendance actuelle est plutôt de s’affranchir de cette règle, sûrement par (compl)aisance grammaticale. À vous de voir si vous souhaitez la respecter ou non. On vous gâte, on vous gâte…

N.B. : Les goûts musicaux exprimés ici sont d’une subjectivité propre à l’auteur de cet article, ils ne doivent pas être pris au sérieux. Second degré et irrévérence peut-être, mais humanité avant tout.

« J’appuie sur la gâchette ? » Monumentale erreur !

L’erreur est commune, mais monumentale. Même Kool Shen et JoeyStarr se sont fait avoir en 1993, quand ils rappaient « J’appuie sur la gâchette » pour parler d’un jeune suicidaire. Ouais, ça veut jouer les gros durs et ça ne sait même pas comment fonctionne un flingue. Petits joueurs…

Et de fait, on ne peut pas appuyer sur une gâchette, puisqu’il s’agit d’une pièce interne du mécanisme de l’arme, celle qui immobilise le percuteur. Elle est donc invisible ! Un peu comme la narration dans un film Marvel. Donc, pour tous ceux qui n’ont pas encore leur permis de chasse, sachez qu’au moment de tirer sur une grive, un lapin ou un Bambi, vous n’appuyez non pas sur la gâchette, mais sur la détente. Vous savez, cette petite languette métallique que Clint Eastwood presse lentement avant de tirer sur un type mal rasé dans ses meilleurs films. Cela donne donc :

  1. « Si tu m’as fait pookie j’appuie sur la gâchette frère. » (nul, voire gênant)
  2. « Si ce voisin persiste avec sa perceuse, j’appuie sur la détente pour me détendre. » ✓✓ (mieux, proche de Boris Vian)

On le sait tous, la prochaine étape du grand ravalement de façade opéré par Mère Nature, c’est l’invasion de zombies. Et on a tous hâte, ne nous le cachons pas. Alors, quand il s’agira de leur éclater la tête avec les jouets préférés de Donald Trump, souvenez-vous de presser la détente, ça marche bien mieux. Ceci étant, si vous êtes doué à ce petit jeu, comme Arnold, vous pouvez dire que vous êtes un « as de la gâchette ». Dans ce cas, ça fonctionne. Ce qui fonctionne beaucoup moins par contre, c’est quand ces fins lettrés de NTM oublient l’accent circonflexe de « gâchette » sur la pochette de leur album ! Ça en revanche, ça me donne vraiment envie de…

« Malgré que », ce monstre hideux

La claquette-chaussette de la faute linguistique : il y en a partout et c’est dégueulasse. Contrairement à ce que beaucoup peuvent penser, « malgré que » n’est pas l’équivalent de « bien que ». C’est même l’équivalent de rien du tout, un peu comme un album de Jul. Il est donc important de bannir cette expression de votre vie, aussi bien à l’oral qu’à l’écrit d’ailleurs. Le meilleur moyen de rester loin de cette chose abjecte est de retenir que : 1) le mot « malgré » à lui seul veut dire « en dépit de », donc en disant « malgré que », en réalité vous dites « en dépit de que », ce qui est proprement inepte ; 2) le mot « malgré » doit toujours être suivi d’un nom et son article ; 3) Jul c’est naze.

Si vous parvenez à imprimer ces trois points, votre espérance de vie vous en remerciera. À titre d’exemples :

  1. « Bien que je sois psychopathe, je n’ai pas l’intention de te bouffer. » ✓✓ (impeccable, rien à redire)
  2. « Malgré que je sois psychopathe, je n’ai pas l’intention de te bouffer. » (faute tragique)
  3. « Malgré ma psychopathie, je n’ai pas l’intention de te bouffer. » ✓✓ (on enlève le « que » et on met un nom à la place de la proposition verbale)

Si, dans une posture d’acharnement proche du syndicalisme, l’on tient à tout prix à utiliser « malgré » et « que » ensemble, il faudra impérativement les séparer par un nom. Il sera donc recommandé de préférer « malgré le fait que ». Ainsi :

  • « Malgré le fait que je sois psychopathe, je n’ai pas l’intention de te déguster le foie. » ✓✓✓

Notons tout de même que l’expression « malgré que » existait autrefois et peut donc être trouvée dans certains ouvrages du siècle dernier, comme chez Alphonse Daudet ou André Gide. Mais aujourd’hui, c’est Twitter et Instagram qui règnent, et quand on peut se simplifier la vie, en France, on hésite rarement. Alors s’il vous plait, profitez-en !

N.B. : Les goûts musicaux exprimés ici sont d’une subjectivité propre à l’auteur de cet article, ils ne doivent pas être pris au sérieux, contrairement aux règles orthographiques qui elles sont obligatoires et passibles de représailles. En vous remerciant.